Des manifestations populares, des greves, des sit-ins, la suspension des activites du pays connues sous le nom de "pays lock" ont ete tenus durant environ trois ans pour exiger la demission de Jovenel Moise. Plus ce dernier s'accroche au pouvoir, plus la situation du pays s'envenime. Face a cette situation aggravee par l'ascension inquietante du kidnapping, le projet de referendum d'une nouvelle Constitution et la tenue eventuelle d'elections frauduleuses, le peuple haitien n'entend pas baisser les bras. Face a un pouvoir repressif, ce peuple choisit le chemin pacifique en vue d'atteindre ses objectifs. Ces derniers ne consistent pas simplement dans le renversement pur et simple d'un gouvernement. Ce peuple entend vivre dans un pays ou ses droits politiques, sociaux, civils et economiques sont respectes. Ce peuple reve d'un Etat qui peut garantir la securite de ses citoyens. Il entend vivre dans un pays ou il ne subit pas la repression d'Etat et des bras armes qui lui sont associes. Ce peuple ne manifeste pas seulement contre les forces internes qui visent a son aneantissement mais aussi contre les forces internationales associees a ces dernieres. Il s'allie a des forces progressistes internationales qui ne restent pas insensibles a son sort. Les forces forces internationales auxquelles il ne demande que la cessation de leur soutien a un gouvernement incompetent et retrograde font la sourde oreille a leurs revendications. Face a cette situation macabre le peuple s'engage dans une lutte de longue haleine. Le role des forces progressistes haitiennes est d'accompagner veritablement ce peuple dans sa quete de lendemains meilleurs apres des souffrances endurees durant plus de deux cents ans. Ces forces doivent proposer a la nation un veritable plan capable de satisfaire ses interets et non pas ceux de l'international. Le plan d'un gouvernement de transition devrait consister a jeter les bases d'un nouveau Etat. Ce plan ne devrait pas viser a la satisfaction de secteurs internes et externes oppressifs mais a celle des desiderata du peuple haitien. Les reformes constitutionnelles, les proces Petro-caribe, des differents crimes economiques et politiques, les projets de reforme politique, economique et sociale, la confernce nationale devraient etre tenues. On comprend que tout ceci ne peut se faire durant une periode de deux ans. Si l'on va une Conference Nationale, on ne va pas dialoguer sans un agenda. L'agenda de la Conference Nationale doit etre etabli. Les discussions devraient etre faites autour de cet agenda. Cette conference peut se culminer par l'elaboration d'un document etablissement un pacte de gouvernance du pays. Ce pacte devrait encourager la participation des secteurs progressistes a la direction des affaires du pays. Dans ce cas ils ne doivent pas etre divisees. Ce pacte devrait encourager la participation massive de la population aux elections. Les secteurs politiques doivent aussi s'engager a eduquer la population, a l'encadrer de telle sorte qu'une partie d'elle desesperee ne soit pas recrutee par les forces retrogrades sous forme de gangs pour accomplir sa sale besogne.
Voici le rapport des manifesations populaires du weekend rapportees par le Nouvelliste:
Des milliers de manifestants ont défilé dans les rues de Port-au-Prince les 28 et 29 mars 2021. Ces manifestants ont répondu à l’appel de plusieurs organisations de la société civile et du secteur protestant exigeant le respect de la Constitution du 29 mars 1987 adoptée il y a 34 ans. Ces derniers ont dénoncé le projet du président Jovenel Moïse qui a annoncé un référendum. Des affiches invitant la population à prendre part à cette consultation populaire ont été arrachées et incendiées par certains manifestants. « Nous n’avons pas un problème de constitution dans le pays. Ce référendum est une stratégie utilisée par le PHTK pour se renouveler et se maintenir au pouvoir. C’est une perte de temps. Le peuple s’opposera et doit s’opposer à ce projet macabre. Nous avons d’autres problèmes qui sont plus urgents tels que le chômage, l’insécurité, la vie chère. On doit savoir choisir les priorités », s’insurge Wilhem, un trentenaire rencontré au carrefour de l’aéroport, dimanche.
Hormis le respect de la Constitution, la marche du dimanche a été l’occasion pour les participants de dénoncer les velléités dictatoriales de Jovenel Moïse. Le pasteur Gérald Bataille, l’un des initiateurs, s’est dit alarmé de la situation du pays. « La patrie est en danger. Nous sommes sous le joug de la dictature, des persécutions et de l’insécurité. Nous sommes dirigés par un gouvernement illégal. Le mandat de ce président est arrivé à terme depuis le 7 février. Voilà pourquoi nous sommes dans les rues. Pour crier notre détresse et notre colère », a fait savoir le révérend.
Gérald Bataille a demandé à la communauté internationale de donner une chance aux Haïtiens pour qu’ils dirigent leur pays. Pour ce berger, aucun problème auquel est confronté le pays ne peut être résolu avec Jovenel Moïse au pouvoir. « Le dialogue est le point de départ de toutes les solutions. Toutefois aucun dialogue n’est possible avec ce monsieur (Jovenel Moïse) », a-t-il estimé.
Viviane Fleurimé, une quadragénaire rencontrée sur la route principale de Delmas, n’a pas caché son exaspération devant la situation actuelle du pays. Elle a dénoncé la gestion « calamiteuse » de l’administration Moïse. « La situation s’est dégradée avec Jovenel Moïse au pouvoir. Les écoles ne peuvent plus fonctionner comme avant. Nous ne sommes plus libres de circuler librement. Mes fils sont obligés de retourner en province en raison de l’insécurité. Je ne peux plus mener mes activités au marché de Croix-des-Bossales à cause des tirs », s’est-elle plaint.
Bible entrouverte, Viviane Fleurimé a souligné en profiter pour lire des Psaumes tout en participant à la manifestation. « Je lis des Psaumes de combat. Je suis en train de lire le Psaume 91. Jovenel Moïse n’est pas au-dessus de Dieu. La voix du peuple, c’est la voix de Dieu. Si le peuple lui demande de partir, il ne doit pas faire la sourde oreille », a-t-elle lâché.
Des leaders et représentants de partis politiques ont également été remarqués sur le parcours. L’ancien candidat à la présidence Jean-Charles Moïse a demandé aux Haïtiens de défendre la Constitution de 1987. « Cette Constitution a 34 ans. On ne peut pas permettre à un dictateur de la changer. Nous sommes contre ce référendum. Nous demandons par conséquent au peuple de se mobiliser contre ce projet dictatorial, contre ce dictateur et contre les étrangers qui tiennent le pays en otage », a-t-il appelé.
De son côté, Schultz Simpssie Cazir, secrétaire général du parti MTV, s'est insurgé contre la situation du pays. « Ma présence dans les rues aujourd'hui est pour dénoncer et protester énergiquement contre l'insécurité, les persécutions et l'intimidation politiques, la corruption, l'impunité et les multiples cas de violation de la Constitution par un pouvoir illégitime qui agit en toute illégalité. Marcher pacifiquement aujourd'hui pour moi exprime mon rejet du plan dictatorial de Jovenel Moïse de nous imposer une constitution à travers un référendum inconstitutionnel, sans un large consensus avec les forces vives du pays », a-t-il fait savoir.
Pour M. Cazir, Haïti peut profiter de cette crise pour prendre désormais un nouveau départ. « C'est une épreuve pour nos élites qui sont appelées à se montrer à la hauteur de cette tranche d'histoire et faire preuve d'éthique, de sens des responsabilités. À cette phase, Jovenel Moïse doit comprendre qu'il ne pourra réussir à organiser ni le référendum ni les élections. L'opposition a déjà, de son côté, fait montre de ses faiblesses. Pour le bien du pays, les deux antagonistes doivent trouver une issue à la crise. Cette solution ne peut venir que de négociations entre le pouvoir et l'opposition, lesquelles permettront de définir le mécanisme d'implémentation de l'article 134.2 et la mise en place d'un gouvernement inclusif après le départ de Jovenel Moïse », a estimé le secrétaire général du MTV.
Maryse Narcisse, la porte-parole de Fanmi Lavalas, a été remarquée sur le macadam dimanche. Interrogée par des journalistes, l’ancienne candidate à la présidence estime que le président Moïse n’a aucune légitimité pour changer la Constitution. « C’est un président de facto. Il n’a aucun droit pour convoquer un référendum pour changer la Constitution », a-t-elle déclaré, appelant à l’intensification de la mobilisation anti-Moïse.
Dimanche, les manifestants se sont rassemblés au Champ de Mars et au carrefour de l’aéroport. Ensuite, ils ont convergé vers la route principale de Delmas, atteint Bourdon en bifurquant par Delmas 60. Certains manifestants ont dénoncé l’influence des États-Unis sur l’échiquier politique en Haïti et ont clamé leur amour pour la Russie et la Chine. D’autres ont imprimé des photos de parlementaires américains comme Andy Levin, Gregory Meek, Stacy Abrams, Alexandria Ocasio-Cortez, et les ont remerciés pour leur engagement en faveur de la cause d’Haïti. La manifestation s’est terminée au Champ de Mars sans grands incidents, sinon des heurts entre certains manifestants et des agents de l’ordre. Des barricades de pneus enflammés ont été remarquées dans les secteurs arpentés par les manifestants.
Ce 29 mars, le jour du 34e anniversaire de la Constitution du 29 mars, les manifestants ont été encore dans les rues, dénonçant le projet de réforme constitutionnelle de Jovenel Moïse. Certains ont apporté des exemplaires de la Constitution de 1987 en signe de leur attachement à ce document. « À bas faux référendum. À bas fausse constitution », scandaient-ils. La police a fait usage de gaz lacrymogène et de balles en caoutchouc pour disperser les manifestants dans l’aire du Champ de Mars. Ces derniers se dirigeaient vers le Palais national. Des blessés ont été enregistrés. Une vive tension a régné dans la zone pendant plus d’une heure. Certains manifestants ont brisé les pare-brises des véhicules qui y passaient.